Professeur Thérèse N’DRI- YOMAN
Coordinateur Sud du Site ANRS de Côte d’Ivoire
PAC-CI, site ANRS de Côte d’Ivoire, a 20 ans
Oui 20 ans…
20 ans de travail, de solidarité, de partage, d’expériences et de réussites,
20 années de "success stories" pour PAC-CI et pour le bien être de la population, dans un contexte souvent difficile,
20 ans de lutte pour un accès équitable aux antirétroviraux alors que nous étions bien peu à les promouvoir en 1998 à la fin des premiers essais cliniques,
20 années de formation de cadres et jeunes chercheurs dans les meilleures universités du monde, qui font aujourd’hui la fierté du Programme PAC-CI et contribuent par leurs actions à la pérennisation du Programme,
20 ans de réflexions et de recherche afin de faire reculer l’épidémie de VIH,
20 années de partenariat continu entre les Républiques Française et Ivoirienne, avec la pleine implication de l’Agence Nationale de Recherche sur le Sida et les Hépatites Virales (ANRS), du Ministère de la Santé et de la lutte contre le Sida, du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, du Ministère de l’Economie et des Finances, de l’Institut de Santé Publique d’Epidémiologie et de Développement (ISPED), de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm) et de l’Université de Bordeaux qui ont uni leurs efforts pour aboutir à la création d’un centre de recherche d’excellence.
Et pour les 20 ans à venir…
Malgré l’engagement humain, politique, technique, l’épidémie du VIH et les barrières à l’accès aux soins sont encore présentes.
Les enjeux évoluent. PAC-CI l’a récemment illustré, en étant la première équipe à présenter les résultats probants d’un essai de traitement précoce [essai ANRS 12136, TEMPRANO]. Cet essai, qui s’est déroulé exclusivement en Côte d’Ivoire, pendant 6 ans, avec 9 centres de soins et avec plus de 2000 participants, a clairement montré que le traitement antirétroviral doit être donné le plus précocement possible. Avec ces résultats, le traitement antirétroviral de toutes les personnes infectées par le VIH, quel que soit leur niveau de CD4, va vraisemblablement être la nouvelle exigence, entrainant de nouvelles interrogations sur les questions de dépistage précoce et d’accès précoce à des soins de qualité.
Les modalités d’intervention changent, et PAC-CI, comme les autres équipes, doit s’adapter. Plus de résultats objectifs et d’impact, donc plus d’évaluation : la recherche opérationnelle doit occuper une place de plus en plus importante dans nos thématiques.
C’est l’occasion de saluer ici les analyses situationnelles de l’épidémie réalisées depuis 10 ans grâce au travail en réseau de la collaboration IeDEA West Africa, financée par le National Institute of Health des Etats-Unis et impliquant 12 pays en Afrique de l’Ouest.
C’est l’occasion également d’affirmer qu’il est important de renforcer la recherche en sciences sociales car leur intégration permet une vision globale de la prise en charge des patients.
PAC-CI continue et continuera à travailler sur le VIH/Sida, mais a déjà commencé à élargir son champ de recherche vers d’autres maladies infectieuses, dont les hépatites virales et les fièvres hémorragiques. Le travail remarquable que vient d’accomplir notre équipe avec le premier essai clinique chez les patients atteints de la maladie à virus Ebola (Essai Inserm/JIKI) en Guinée en est l’illustration. Trois de nos chercheurs viennent de passer plusieurs mois en Guinée pour accompagner nos frères de la Guinée dans la lutte contre l’épidémie.
Depuis quelques années, nos études s’ouvrent aux autres pays du monde, aux autres pays d’Afrique, à l’Asie, et à l’Amérique latine. Les études sont de plus en plus multi-pays et multicentriques, avec des défis techniques et logistiques nouveaux.
Nous avons créé avec nos partenaires du centre Inserm 897 et de l’ISPED/Université de Bordeaux un centre de méthodologie de la recherche dénommé Mereva (http://mereva.isped.u-bordeaux2.fr/), qui va nous aider à relever ces défis.
Le bilan du passé est excellent, mais la tâche à accomplir dans l’avenir reste immense. Nous sommes prêts. Prêts à évoluer, prêts à reprogrammer nos modalités d’intervention, et à les adapter aux nouveaux défis, avec un enthousiasme intact.
La santé est un droit, la maîtrise des épidémies un objectif, et la solidarité un devoir.